« Nous savons très bien ce que fait la Russie... » Un site militaire en construction à la frontière de la Finlande
La Russie construit une garnison à Kandalaksha, au nord-ouest du pays, pour une brigade d’artillerie. Il s’agirait du premier signe concret d’une augmentation permanente du nombre de soldats près de la frontière finlandaise.
Depuis le début de la guerre en Ukraine et l’adhésion de la Finlande à l’Otan, certaines inquiétudes, jugées irrationnelles dans un premier temps, ont émergé concernant une possible volonté expansionniste de Vladimir Poutine dans le pays nordique frontalier de la Russie.
Or, Moscou renforce bel et bien sa présence près de la frontière finlandaise. Le média finlandais Yle a ainsi dévoilé ce mercredi 18 juin des images satellite auxquelles il a eu accès, sur lesquelles on aperçoit des constructions, à Kandalaksha, au nord-ouest de la région de Mourmansk.
De nouveaux travaux ont été réalisés pendant l’hiver dernier et plusieurs bâtiments sont sortis de terre dans la garnison de Lupche-Savino, située à environ 110 km de la frontière finlandaise, qui fait partie de la ville de Kandalaksha. Jusqu’à présent, la Russie utilisait cette zone uniquement pour le stockage. Yle assure qu’aucune information sur les travaux de construction de la garnison de Lupche-Savino n’a été rapportée auparavant en dehors de la Russie.
Une volonté de renforcer les troupes de manière permanente
Les images satellite obtenues par Yle révèlent également des changements sur les sites militaires russes de l’isthme de Carélie. De nouveaux équipements sont notamment visibles à la garnison de Sapyornoye, située dans la zone de l’ancienne municipalité de Sakkola. En outre, la Russie a poursuivi ses préparatifs militaires à Petrozavodsk, la plus grande ville de la République de Carélie.
Contrairement aux autres zones, les images satellite de la garnison de Lupche-Savino témoignent d’une évolution nouvelle et différente : la Russie semble chercher à renforcer de façon permanente ses troupes, en particulier le long de la frontière avec la Finlande.
« Si le seul objectif était d’envoyer des troupes en Ukraine, il n’y aurait évidemment pas besoin de telles infrastructures », a analysé Marko Eklund pour Yle. Marko Eklund a fait une longue carrière dans le renseignement militaire finlandais et surveille les forces armées russes depuis plus de vingt ans.
« Des services nécessaires pour les soldats professionnels »
Si Kandalaksha est un centre de transport clé à l’extrémité de la mer Blanche, Lupche-Savino est ce que l’on appelle une zone administrative fermée - une ville militaire à laquelle on ne peut accéder qu’avec une autorisation spéciale. Les autorités régionales de Mourmansk ont déclaré que la ville militaire était construite pour accueillir une nouvelle brigade d’artillerie et son personnel, et qu’il était également prévu d’y loger une autre brigade.
D’après Marko Eklund, les deux brigades Lupche-Savino devraient apporter un peu plus de 2 000 soldats dans la région.
Andrei Chibis, le gouverneur de la région de Mourmansk, a déclaré que les travaux de construction de la garnison s’inscrivaient dans le cadre d’un projet de modernisation des villes militaires fermées en 2024-2026. Un total de 42 milliards de roubles - environ 460 millions d’euros - a été alloué à la rénovation des villes militaires de la région de Mourmansk.
« Des services sont nécessaires pour les soldats professionnels. Il est difficile de recruter des familles au milieu de nulle part », explique Marko Eklund.
L’administration régionale de Mourmansk a déclaré qu’en plus des nouvelles constructions, deux immeubles résidentiels de l’ère soviétique datant du début des années 1970 ont été entièrement rénovés à Lupche-Savino. De même, sept immeubles d’habitation précédemment abandonnés ont été réparés et rendus habitables.
« Rien de surprenant »
« La menace pour la Finlande découle naturellement de considérations politiques, mais elle est renforcée à la frontière finlandaise, elle se rapproche d’autant », a estimé Marko Eklund. Le déplacement des troupes et du matériel prend néanmoins du temps, et les Finlandais estiment qu’ils disposent d’environ cinq ans avant que la Russie puisse renforcer suffisamment ses forces pour représenter une menace.
Le ministre finlandais de la défense, Antti Häkkänen, a déclaré à Yle qu’il n’y avait « rien de surprenant » dans les images satellite, ajoutant qu’ « avec nos alliés, nous avons une bonne capacité à surveiller comment la Russie développe ses propres forces armées. (…) Nous savons très bien ce que fait la Russie, et c’est ce à quoi nous nous préparons également pour notre propre défense. Helsinki a ainsi par exemple entrepris de construire une clôture de 200 kilomètres prévue à sa frontière orientale avec la Russie.
« La Russie consacre beaucoup d’efforts à cette nouvelle réforme des forces armées, et nous en sommes bien conscients, poursuit le ministre. Il n’y a rien de surprenant à cela, mais nous devons être préparés ».
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