lundi 14 juillet 2025

« La guerre en Europe est déjà là » : le chef d’état-major des Armées appelle à une prise de conscience collective

 

- Michel Wieviorka, sociologue : « Le thème de la guerre hybride est insuffisant pour mobiliser la société » (Lemonde

A Paris, le défilé d’une armée « prête au combat » pour le 14 juillet dans un contexte de guerre en Europe. Des militaires en treillis et casque lourd à bord de leurs blindés : le défilé du 14 juillet à Paris a mis lundi en avant une armée « prête au combat », au lendemain de la promesse d’Emmanuel Macron d’accroître encore les dépenses de défense face « à un monde plus brutal ». Challenges

 - « On n'évite pas la guerre avec de bonnes intentions » : la mise en garde du chef d'état-major des armées contre la Russie. Face à la multiplication des menaces, le chef d'état-major des armées appelle à une prise de conscience de la France. La Russie, désignée comme adversaire principal, intensifie ses attaques hybrides. LesEchos

-  Pour la première fois depuis le début de la guerre en Ukraine, le chef d’état-major des armées françaises s’est exprimé lors d’une conférence de presse, ce vendredi 11 juillet. Une prise de parole exceptionnelle, à la mesure des menaces. Selon le général Thierry Burkhard, la France est une cible prioritaire de Moscou et le monde est entré dans une ère de conflictualité permanente.

Le chef d’état-major des armées, Thierry Burkhard, n’est pas homme à multiplier les sorties médiatiques. Mais à menace exceptionnelle, communication exceptionnelle. Après le patron de la DGSE, Nicolas Lerner, en début de semaine, qui a alerté sur la dégradation rapide de l’environnement stratégique mondial, c’était au tour du CEMA de s’adresser à la presse, ce vendredi 11 juillet. Trois jours avant le 14-Juillet et la prise de parole attendue d’Emmanuel Macron. Et le tableau brossé par le général Burkhard est sans appel : la guerre est là, en Europe ; le monde a basculé dans une instabilité chronique, avec une superposition des crises et il n’y aura pas de retour en arrière.

 Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Trente conflits étaient dénombrés dans le monde dans les années 1990 contre plus de 120 aujourd’hui, selon le Comité International de la Croix-Rouge (CICR). Une prolifération des conflits que Burkhard qualifie d’« effet cliquet » : chaque crise franchit un seuil, et ensuite plus rien ne revient jamais au statu quo.

Le général l’affirme encore : la compétition est devenue omnidimensionnelle, elle s’exerce dans tous les champs – militaire, économique, informationnel, spatial, numérique. Une guerre « hors limite » qui n’épargne pas les Français, car ils sont directement visés, notamment par une arme sournoise : la désinformation

La Russie au cœur des inquiétudes

La Chine fait évidemment partie des pays acteurs dans ces actions : « Un compétiteur systémique », dit le général. Espionnage, campagnes de dénigrement – comme celle récente qui ciblait les avions Rafale après un accident en Inde – et main invisible sur les réseaux sociaux. Le tout sans jamais rien revendiquer.

Mais c’est la Russie qui concentre l’attention et l’inquiétude du chef d’état-major. « Une menace durable, proche et dimensionnante », qui a désigné la France comme adversaire prioritaire en Europe. L’armée russe, malgré les pertes en Ukraine, reste selon lui « un modèle d’armée complet », structuré, endurant, avec une doctrine claire, robuste et une chaîne de commandement solide. Et avec un chef très largement responsable de la situation : « Poutine est l’homme de la guerre » a déclaré le chef d’état-major.

La Russie, engagée dans une économie de guerre, n’a aucune raison de mettre fin au conflit tant que ses objectifs stratégiques ne seront pas atteints. Le Kremlin mise sur la militarisation de l’espace, les incursions sous-marines dans l’Atlantique et la Méditerranée, les cyberattaques, la propagande en Afrique, la désinformation en Europe et l’intimidation nucléaire. Et Moscou ne négociera que s’il perd. Toute autre issue serait un échec collectif. Défendre Kiev, c’est donc se défendre soi-même. Selon le chef d’état-major, une défaite ukrainienne serait une défaite européenne, renforçant la nécessité de soutenir l’Ukraine. « Sinon, nous serons des herbivores dans un monde de carnivores », pour reprendre une formulation déjà utilisée par Emmanuel Macron.

La dissuasion en question, le climat comme amplificateur

Le chef d’État-major n’a pas manqué de livrer son analyse du conflit en cours, car un pays doté de l’arme nucléaire a attaqué un pays qui ne l’est pas. Un fait rare dans l’Histoire et un véritable renversement qui brouille les repères traditionnels de la dissuasion. Et montre que la force, pour nombre d’États, est redevenue le moyen préféré pour obtenir gain de cause.

À cela s’ajoute, en toile de fond, la remise en cause de l’ordre international hérité de 1945, menée tambour battant par Vladimir Poutine, chantre d’un monde « désoccidentalisé ».

Le général Burkhard a également alerté sur le rôle catalyseur du changement climatique : tensions sur les ressources, migrations, chaos politique. Un facteur aggravant qui rend les crises plus fréquentes, plus diffuses et potentiellement plus longues.

Une armée lucide, un pays exposé

Face à ces tensions, le chef d’état-major a reconnu l’effort consenti par la nation pour ses armées. Mais il appelle à une lucidité stratégique, alors que le risque de guerre en Europe n’est plus une hypothèse théorique. Il est « là, sous nos yeux », avec la possibilité d’un affaiblissement de l’engagement américain.

 La France ne peut plus se contenter de se défendre. Elle est déjà dans le viseur de puissances bien décidées à exploiter ses faiblesses. Sans être alarmiste, le chef d’état-major a appelé à une prise de conscience collective : le risque de guerre en Europe n’est plus une hypothèse lointaine, il est désormais tangible et visible.

Challenges 

 

 - Plusieurs navires de guerre russes, dont un armé de missiles Kalibr, repérés en Méditerranée Ladepeche

 

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