mercredi 3 février 2016

Travail, Agriculture, Santé, retraite..

Société & modes de vie, Travail, Temps de travail, Agriculture, Santé, Retraite

 
 Coronavirus & confinement
>>> JAN2021 Luc Ferry: «La liberté plus que la vie?»
 CHRONIQUE - Déplorer les erreurs commises par nos gouvernants ne doit pas nous empêcher de reconnaître qu’ils ont eu globalement raison de mettre, pour la première fois dans l’histoire, la vie au-dessus de l’argent. LeFigaro
 
 
RTT
>>> JUILL2020 LDLC veut passer 1.000 salariés à la semaine de quatre jours
Laurent de la Clergerie, président du vendeur en ligne de matériel informatique, a surpris ce mercredi en annonçant la baisse du temps de travail, à l'heure où certains reparlent des 39 heures. Pour lui, il faut travailler moins pour travailler mieux. LesEchos

Remise en cause des 35h par LR
>>> JUIN2020 Chez LR, le retour du « travailler plus pour gagner plus »
La question des 35 heures s’est invitée dans le plan de relance du parti Les Républicains, qui plaide pour une annualisation du temps de travail négociée à l’échelle des entreprises.
Les « Guignols de l’info » ont disparu depuis bien longtemps, mais tout le monde se souvient de la marionnette d’Ernest-Antoine Seillière, patron du Medef à la fin des années 1990, braillant : « Les 35 heures sont une aberration ! » Plus de vingt ans après, et à la suite de moult détricotages de la réforme portée par Martine Aubry en 1998, la question de l’augmentation du temps de travail des Français est encore posée régulièrement. Lemonde
Ce n’est pas les 35h qui sont une aberration, ce sont plutôt Les Républicains, dignes perroquets du Medef (qui a multiplié les tribunes hostiles aux 35h pendant la crise du Covid-19). Le retour d’agités du style Sarkosy, on n’en veut pas !
Les effets ravageurs de la société de sur-consommation sur la condition sociale, l’écologie, la famille, la spiritualité. Un exemple en Allemagne :
>>> DEC2019 Travail. En Allemagne, de plus en plus de “semaines sans week-end”
Les Allemands sont de plus en plus nombreux à travailler le samedi, le dimanche et certains jours fériés, d’après les chiffres dévoilés par le Bureau fédéral des statistiques. Un mode de vie parfois subi, particulièrement “épuisant” dans la période qui précède Noël, et qui empiète sur les loisirs et le temps passé en famille, pointe la Süddeutsche Zeitung. CI


Agriculture
22 février 2019 (guerre commerciale)
>>> La spectaculaire résurgence de l'agriculture russe met la France au défi
La Russie domine les exportations mondiales de blé. Sa stratégie de conquête bouscule les ventes françaises.
« Nous sommes dans le brouillard alors que nos compétiteurs avancent très vite... Tout particulièrement la Russie ». En présentant la dernière note publiée par Agridées en janvier, Yves Le Morvan, le responsable filières et produits du think tank français, ne cache pas que la situation devient préoccupante. « Y a-t-il une filière exportatrice céréalière en France ? Nous nous sommes posé la question. Il s'agit pourtant du premier des débouchés d'export du pays. » Le laboratoire d'idées du secteur agricole depuis un siècle et demi assure qu'il ne tire pas la sonnette d'alarme. Mais il juge l'importance du sujet « très sous-estimée » (LesEchos)


>>> OCT2018. Les suicides déciment toujours le monde agricole en France. Le nombre de suicide chez les agriculteurs français culmine à des niveaux alarmants depuis plus de 40 ans. Une situation que les politiques de soutien ne parviennent pas à enrayer. Euractiv
>>> FEV2018. Les circuits courts, une solution à la crise agricole LeFigaro
>>> SEPT2017. Les agriculteurs français s’opposent à Hulot sur le glyphosate Euractiv



>>> AOUT2017. Les agriculteurs européens réclament une chaîne alimentaire plus équitable. Les coopératives agricoles appellent la Commission à accroître la transparence dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Et à promulguer une loi européenne pour protéger les producteurs alimentaires des pratiques commerciales déloyales. Euractiv
>>> JUIN2017. Le marché agricole européen risque d’être chamboulé par le Brexit Euractiv

>>> Crise agricole
Sur les dix dernières années, les agriculteurs ont perdu 30% des bénéfices de la valorisation de leurs produits au profit de la grande distribution. José Bové estime que la solution à cette crise est simple : "je crois qu'au niveau de la France, c'est à l'État de dire : 'on met en place des prix planchers et on ne peut pas acheter en dessous du prix de production', et après on négocie avec Bruxelles".
José Bové appelle à la fermeté de la France sur ce dossier. "Quand les Anglais ne sont pas contents, ils savent se faire entendre. (...) Un chef d'État, un ministre de l'Agriculture, doit être en capacité de taper du poing sur la table", estime l'élu. Le vice-président de la commission milite aussi pour une régulation de l'offre et de la demande au niveau européen.

Voir aussi :  
le site de la ConfédérationPaysanne


CH1229:


Lire aussi : 

>>> La crise agricole frappe aussi durement les éleveurs allemands Bastamag

>>> FEV2016. Elevage en crise. La réponse est dans le terroir.  Alors que les éleveurs français affrontent une crise sans précédent, certains se tournent vers des productions préservant l’environnement,mieux rémunérées. Un virage salutaire, mais qui prend du temps. LaVie

>>> La France trouve du soutien à l'Est face à la crise agricole   EurActiv
>>> Leboncoin, cimetière des éleveurs frappés par la crise du lait    LeMonde






La RTT
>>> La Suède teste la journée de 6 heures. Et ça fonctionne !
A Göteborg, la municipalité tente une expérience originale : faire travailler une partie de son personnel "seulement" six heures par jour pour augmenter sa productivité. Un exemple dont il faut s'inspirer ? Lobs
>>> Jean-Yves Boulin : «Les pays nordiques placent la durée du travail à l’échelle d’une vie»

Pour le sociologue Jean-Yves Boulin, plusieurs Etats européens, comme la Suède, innovent sur une question figée en France depuis une quinzaine d’années pour des raisons idéologiques. Pourtant, la réduction du temps de travail pourrait faire baisser le chômage. Libé

31 mai 2019
>>> Les Français ne travaillent pas assez, vraiment ? Lexpress

>>> FEV2018. Que répondre à votre beau-frère qui vous bassine sur les 35 heures ?
Les 35 heures fêtent ce samedi les 20 ans de leur vote en première lecture. Le temps d'un bilan dépassionné ? Pas pour Jean-Claude, toujours fumasse. Que lui envoyer dans les dents ?
Sacré Jean-Claude ! Que seraient les déjeuners familiaux du dimanche sans lui ? Votre beau-frère a entendu sur BFMTV qu’on célébrait ce samedi le vingtième anniversaire des 35 heures (du moins l’adoption en première lecture de la première loi Aubry), et son sang s’est mis à bouillir comme en 1998. Les images de "prof Jospin" et de "cette hystérique d'Aubry" sont revenues lui hérisser le poil, que le lascar a particulièrement dense et dru. L'Obs

 Éloge des 35 heures
Alors que les attaques contre les 35 heures se multiplient, non seulement à droite et dans la « grande presse » , mais aussi, hélas, au sein de la gauche - Emmanuel Macron étant même devenu le champion de Pierre Gattaz - , il devient urgent pour les bénéficiaires de la RTT – des ouvriers aux cadres supérieurs – de défendre cette avancée sociale, l'une des rares grandes mesures de gauche profitant aux classes moyennes, à la "France qui travaille". Rappelons que lors de sa mise en place, les négociations avaient été menées en incluant l'ensemble du monde du travail, y compris les organisations patronales, qui avaient notamment obtenu en "contrepartie de la RTT' une flexibilité accrue des salariés. Flexibilité qui n'a jamais été, elle, remise en question. Les différentes parties y avaient ainsi trouvé leur compte. Rappelons, aussi, qu'un "assouplissement" des 35 heures a déjà été mis en place sous Sarkosy (l'application du fameux 'travailler plus pour gagner plus'), y compris la suppression du lundi de Pentecôte.

 
Trop peu de voix s'élèvent pour réaffirmer l'utilité des 35 heures hebdomadaires en terme d'emploi ou de progrès social. Martine Aubry (mais aussi Manuel Valls) s'opposent à Emmanuel Macron sur cette question.

Emploi, coût, pouvoir d'achat…, Martine Aubry répond à la droite et défend les 35 heures.

On ne peut pas parler des 35 heures sans revenir à la situation dans laquelle nous étions en 1997. 3 250 000 chômeurs. Un jeune actif sur quatre sans emploi. Un million de RMIstes. Un moral des ménages et des entreprises au plus bas. Une croissance à la traîne de l'Europe. Des salaires gelés, les fruits de la croissance profitant exclusivement aux revenus du capital. Une progression des inégalités. Une natalité en baisse. Des quartiers en déshérence. Une sécurité sociale en faillite… Bref, une société bloquée, qui avait perdu confiance en l'avenir et déclinait. Nous avions la conviction que l'emploi était au coeur de la solution à beaucoup de ces problèmes. C'était, en 1997, la préoccupation numéro 1 des Français. Lionel Jospin et son gouvernement en ont fait leur priorité.
Alors que tous les gouvernements avaient échoué sur la lutte contre le chômage depuis vingt ans, il fallait montrer un grand volontarisme et ouvrir toutes les pistes possibles. Lutter contre le chômage n'est pas un combat idéologique. C'est un combat politique, qui exige de mobiliser une part majeure des ressources et des énergies de la société pour la création d'emplois. Si la politique a un sens, c'est bien d'agir pour permettre à chacun de trouver un emploi, non seulement pour gagner sa vie, mais aussi pour trouver une place dans la société, une utilité sociale et ainsi tout simplement pour exister. Attaquer le chômage par tous les bouts, tel était donc notre objectif. Les résultats ont été là: 2 millions d'emplois créés de 1997 à 2002, 900 000 chômeurs en moins.
Il fallait (malheureusement) une loi
Mais fallait-il une loi? Mon intime conviction est que sans loi, il n'y aurait pas eu les 35 heures. En effet, contrairement à d'autres pays (Allemagne, Belgique), il n'y avait plus de négociation réelle en France sur la durée du travail. L'accord interprofessionnel de 1995 sur ce sujet n'avait eu quasiment aucun effet. Notre durée du travail ne diminuait plus depuis 1983. La loi Robien avait bien tenté de remédier à cet arrêt, avec un objectif peu éloigné du nôtre. Le rapporteur de la loi, Yves Nicolin, déclarait: "Ce serait une grave erreur de ne pas s'engager dans cette voie qui, au regard des politiques menées jusqu'à maintenant, paraît la plus prometteuse." Jean-Yves Chamard affirmait également: "Nous avons tous constaté que les recettes traditionnelles de la lutte contre le chômage avaient fait leur temps et montré leurs limites. Chacun convenait qu'il fallait prendre des mesures amples. L'aménagement-réduction du temps de travail a été considéré comme une des grandes réformes qui s'imposaient." Mais la loi Robien s'appuyait sur le volontariat. Même si la loi était intéressante par l'expérimentation qu'elle tentait, les résultats ont été décevants. En juillet 1997, seuls 100 000 salariés étaient concernés dans 920 accords. A ce rythme, il aurait fallu un siècle pour que tous les salariés soient à 35 heures, malgré le caractère extrêmement incitatif des aides prises.
Nous avons néanmoins tout fait pour obtenir un accord interprofessionnel. Nous y avons consacré l'été 1997. Je ne vais pas revenir sur les circonstances de la conférence du 10 octobre qui, par son côté théâtral, a focalisé et continue de focaliser l'attention. En tout état de cause, il faut savoir que les deux lois ont été préparées après des centaines d'heures de discussions et de débats avec les organisations patronales et syndicales, et une très large concertation. Elles sont aussi le fruit d'un travail parlementaire considérable et, pour la seconde loi, la résultante des négociations de dizaines de milliers de chefs d'entreprise et de syndicalistes. Jamais des lois n'avaient donné lieu à tant de concertation et ne s'étaient autant appuyées sur la négociation.
400 000 emplois ont été créés
L'impact des 35 heures sur l'emploi a été examiné sous tous les angles. Ils convergent pour évaluer à 400 000 emplois environ leur effet net dans le secteur concurrentiel (hors hôpitaux et collectivités locales), comme le confirment des enquêtes de la Dares et de l'Insee. Les données macroéconomiques confirment ces résultats. La France a connu un véritable boom de l'emploi entre 1999 et 2000 (au moment où la réduction du temps de travail s'est faite) jamais connu dans l'histoire économique de notre pays, loin de là, même pendant les périodes de forte croissance. Ce boom ne peut s'expliquer autrement que par un effet décisif des 35 heures et des emplois-jeunes.
Les créations d'emplois entre 1997 et 2002 ont été neuf fois supérieures à celles des vingt-cinq années précédentes (48 000 par an) et trois à quatre fois supérieures à celles des Trente Glorieuses (120 000 par an entre 1955 et 1973). La conjoncture internationale n'explique pas le caractère hors normes de cette accélération. En effet, les créations d'emplois ont été plus importantes que dans les autres pays européens, soumis à une même conjoncture: selon Eurostat, le taux de création d'emplois entre 1999 et 2001 a été de 50% plus élevé en France que dans les autres pays européens (2,5% par an, contre 1,6%). Alors que la France en créait deux fois moins auparavant: 0,4% en France entre 1995 et 1997, contre 0,8% en moyenne dans les autres pays européens. De plus, les 400 000 emplois créés par les 35 heures ne comprennent pas les emplois indirects créés dans les secteurs du sport, des loisirs et du tourisme, par exemple. Certains les chiffrent de 40 000 à 50 000 emplois.
Les recettes ont équilibré les coûts
Maîtriser le coût des 35 heures était central dans notre démarche. Nous avons toujours pensé que la crédibilité de notre politique économique était en jeu derrière cette question. Cela s'est traduit par une décision simple: les sommes allouées aux aides à la réduction du temps de travail devraient être compensées par les retours attendus pour les finances sociales et publiques (baisse des dépenses d'indemnisation du chômage, hausse des recettes sociales et fiscales). C'est ce que les économistes appellent "l'activation des dépenses passives" du chômage: payer pour l'emploi plutôt que pour le chômage.
Les politiques de l'emploi se revendiquent souvent de cet esprit, mais la réduction du temps de travail (RTT) est une des rares politiques qui en mérite le titre. Pour une raison simple: les aides et les embauches sont directement liées, déclenchées l'une comme l'autre par le passage aux 35 heures. Si ça marche, ça coûte, mais ça rapporte aussi beaucoup; si ça ne marche pas, ça ne coûte rien. On est bien loin de la logique des allégements de charges sans contrepartie où l'Etat doit commencer par payer beaucoup sans rien recevoir et sans que l'on sache véritablement quels sont les effets d'une telle politique souvent de simple aubaine. On est encore plus loin de la logique actuelle qui consiste à réduire les dépenses chômage non pas par l'accès à l'emploi, mais par la réduction et la suppression des allocations.
Pour en revenir aux 35 heures, le montant de l'aide forfaitaire pérenne - 610 euros (4 000 francs) par salarié à 35 heures - a donc été fixé de manière à être intégralement compensé par les retours financiers (1) attendus des 35 heures (baisse de l'indemnisation chômage, hausse des cotisations sociales, etc.). A titre de comparaison, les aides de la loi Robien étaient très supérieures: à deux Smic (soit autour du salaire moyen), elles représentaient 2 744 euros (18 000 francs) par an et par salarié. La loi Robien n'était pas finançable à grande échelle: appliquée à l'ensemble de l'économie, elle aurait coûté, chaque année, entre 30 et 45 milliards d'euros (de 200 à 300 milliards de francs).
Le coût des 35 heures en régime de croisière a été évalué exante à 6,1 milliards d'euros (40 milliards de francs). Un amalgame a souvent été fait avec les autres exonérations de cotisations patronales. Les allégements Balladur-Juppé sur les salaires inférieurs à 1,3 Smic représentaient, en 1997, un montant d'environ 6,1 milliards d'euros (40 milliards de francs). Nous avons décidé, en 2000, d'étendre le dispositif à tous les salaires jusqu'à 1,8 Smic (soit à la quasi-totalité des non-cadres). Il s'agissait d'en corriger les effets néfastes, et notamment le frein aux augmentations salariales au-dessous de 1,3 Smic. Afin de limiter les effets d'aubaine et d'assurer les contreparties d'emploi, cette nouvelle exonération a été accordée en priorité aux entreprises passant à 35 heures Le montant de cette extension a été évalué à 3,8 milliards d'euros (25 milliards de francs) en régime de croisière. Mais la réduction du temps de travail représentait uniquement 6,1 milliards de d'euros.
On peut à la rigueur rajouter les 3,8 milliards (25 milliards de francs) accordés aux bas salaires, car nous avions réservé ces aides supplémentaires aux entreprises à 35 heures, même si cela a permis une baisse de 3% à 8% du coût du travail (financement de la RTT compris, sur les salaires inférieurs à 1,4 Smic) et donc n'a pas uniquement rempli l'objectif de financement des 35 heures. En revanche, que l'on impute aux 35 heures l'ensemble des 16 milliards d'euros d'abaissements de charges (105 milliards de francs) n'est pas sérieux, car on prend en compte ceux qui n'ont pas eu de RTT pour contrepartie.


Des salariés globalement satisfaits

Les sondages auprès des salariés des entreprises passées aux 35 heures montrent une large satisfaction, malgré une pression accrue. Ainsi, selon l'enquête menée par la Dares (1), 12,8% seulement des salariés interrogés considèrent que la RTT a détérioré leurs conditions de vie. Cela s'est donc bien ou correctement passé dans 87,2% des cas. Si les salariés sont globalement satisfaits, la réorganisation du temps de travail a été insuffisamment mise à profit pour améliorer les conditions de travail: 26% en moyenne constatent une amélioration, le même nombre une dégradation, pour les autres, les conditions au travail sont jugées inchangées. Les difficultés dans ce domaine portent cependant sur des problèmes qui ne sont pas spécifiques à la réduction du temps de travail. Si la pénibilité physique du travail recule avec la désindustrialisation et la mécanisation des processus de production, elle fait place à l'augmentation du stress, lié tant à l'intensification du travail qu'à la demande de polyvalence accrue (qui concerne un salarié sur deux), qui est déstabilisante. 18% des 28% de salariés qui perçoivent une dégradation des conditions de travail se sentent plus stressés au travail depuis les 35 heures. Il est clair que certains chefs d'entreprise ont utilisé la RTT pour accroître encore la pression.
(1)
"Les effets de la RTT sur les modes de vie: qu'en pensent les salariés un an après?".
[1] "Les effets de la RTT sur les modes de vie: qu'en pensent les salariés un an après?".


Qu'en a-t-il été par la suite? Le coût des 35 heures a été très proche de ce qui avait été prévu dès 1998. C'est une performance de réussir une prévision aussi précise. Ainsi, en 2002 (2), le montant des allégements de charges s'est élevé à 15,4 milliards d'euros (101 milliards de francs), dont 5,2 milliards d'euros (34 milliards de francs) pour les 35 heures, 2,6 milliards d'euros (17 milliards de francs) pour les nouveaux allégements bas salaires et 7,6 milliards d'euros (50 milliards de francs) pour les allégements Juppé et Robien. Avec environ 400 000 emplois créés pour 5,2 milliards d'euros, le coût par emploi créé est donc d'environ 13 000 euros (85 275 francs). A titre de comparaison, le coût d'un emploi créé avec le contrat initiative emploi (CIE) de 1995 était de l'ordre de 45 000 à 53 000 euros. Les retours financiers associés ont été estimés à 6,5 milliards d'euros (43 milliards de francs) pour la sécurité sociale et l'Unedic (et donc sans prendre en compte les retours financiers pour l'Etat) par les services du ministère du Travail (Dares). Ils couvrent une grande partie du coût des 9,9 milliards d'euros (6,1 milliards d'euros pour les 35 heures et 3,8 milliards d'euros pour l'extension des exonérations de charges).
La compétitivité de l'économie française s'est améliorée
Je veux le dire clairement: nous n'aurions pas fait les 35 heures si celles-ci avaient impliqué une dégradation de la compétitivité de la France. C'eût été mettre en cause la pérennité des emplois créés. C'est la raison pour laquelle nous avons posé un principe: la RTT devait se faire sans augmentation des coûts salariaux (à ne pas confondre avec l'augmentation des salaires). Ainsi, l'accroissement mécanique du coût horaire du travail (compte tenu du maintien des salaires) devait être financé peu ou prou en trois tiers: un tiers de gains de productivité (3% à 4%, soit 7% à 8% de créations d'emplois pour un passage de 39 heures à 35 heures); un tiers d'aides (3% à 4%); un tiers de modération salariale (3% à 4%). Cet objectif a été tenu, avec toutefois des gains de productivité un peu supérieurs (50% du financement au lieu de 33%) et une modération salariale inférieure (2% au lieu de 3% à 4%), les aides représentant bien le tiers de la compensation des coûts horaires.
Les 35 heures n'ont donc pas eu d'impact négatif sur les coûts salariaux. Les coûts salariaux unitaires (masse salariale sur valeur ajoutée) ont baissé de 10% entre 1996 et 2002, grâce aux allégements de charges et aux gains de productivité. C'est la plus forte baisse de la plupart des pays de l'OCDE (ils ont baissé de seulement 2% aux Etats-Unis et augmenté de 5% en Allemagne et de 15% au Royaume-Uni). Selon l'OCDE, le coût relatif de la main-d'oeuvre (en réel et en dollars) a baissé de 17% par rapport au dix-sept plus gros partenaires, contre - 12% dans l'Union européenne, alors qu'il augmentait de 18% aux Etats-Unis, selon la Dares. Si bien que, globalement, la compétitivité de la France, loin de se dégrader, s'est améliorée.
Selon l'Insee, les 35 heures seraient à l'origine de gains de productivité de 4% à 5% pour les entreprises. La France se place désormais au deuxième rang mondial pour la productivité horaire du travail (devant les Etats-Unis, l'Allemagne, le Japon, le Royaume-Uni, l'Italie…) et à 20% au-dessus de la moyenne européenne. La France s'est par ailleurs située au troisième rang des investissements étrangers en 2001 et au deuxième (avec la Chine, derrière les Etats-Unis) en 2002 (3). Bref, la France attire par la qualité et la productivité de sa main-d'oeuvre, la densité et l'efficacité de ses infrastructures, et la taille et le dynamisme à moyen terme de son marché. Les 35 heures, loin de nous affaiblir, ont renforcé ces atouts.
Le pouvoir d'achat des Français s'est accru
L'objectif de maintien des salaires lors du passage à 35 heures a été clairement affiché: "les 35 heures sans baisse de salaires". Néanmoins une contribution était demandée aux salariés sous forme de modération salariale. Elle devait représenter un tiers du financement (gel des salaires pendant quelques trimestres ou modération salariale pendant une période plus longue). Cet objectif a été assorti d'une garantie au niveau du Smic assurant cette non-baisse de salaire et une progression minimale d'au moins la moitié du pouvoir d'achat moyen des salariés. Cet objectif a bien sûr été totalement respecté au niveau du Smic, mais il l'a également été pour la quasi-totalité des salariés: seulement 6,8% des salariés passés à 35 heures dans le cadre d'un accord première loi ont subi une baisse de salaire. La proportion est quasiment identique pour les accords de la deuxième loi (8%). C'est d'ailleurs un net progrès par rapport à la loi Robien, où les baisses de salaires concernaient deux fois plus de salariés (14,7%).
La modération salariale a été moins forte que prévu (1% au lieu de 3%). C'est ce que montre une étude de la Dares comparant l'évolution des salaires dans les entreprises passées à 35 heures avec celles restées à 39 heures La progression des salaires n'a été que de 1% supérieur dans les secondes par rapport aux premières, alors que les salariés travaillaient quatre heures de moins. Au total, l'impact de la RTT sur les revenus salariaux aura été de 2%: 1% de modération salariale et 1% de réduction d'heures supplémentaires.
L'Insee confirme dans son dernier Portrait social de la France que la réduction du temps de travail ne s'est pas faite au détriment du pouvoir d'achat. Bien au contraire, le niveau de vie moyen de l'ensemble de la population a augmenté de 7,5% entre 1997 et 2000, ce qui représente l'équivalent d'un treizième mois pour tout le monde. Toute l'échelle des revenus est concernée, dans des proportions comparables, avec un léger avantage pour le bas de l'échelle (+ 9,2% pour les 10% qui gagnent le moins, 6,1% pour la médiane, 6,5% pour les 10% qui gagnent le plus).
Revaloriser le travail, c'est avant tout en trouver un à ceux qui n'en ont pas. On ne peut pas dire que le gouvernement actuel, avec 200 000 chômeurs supplémentaires, en prenne le chemin. Les 35 heures n'ont pas été la politique malthusienne dénoncée par certains: elles ont créé une nouvelle dynamique avec à la fois davantage de travail et un travail mieux réparti. Les créations d'emplois ont en effet plus que compensé la réduction du temps de travail: le nombre d'heures travaillées a fortement augmenté entre 1997 et 2002 (+ 8%), alors qu'il stagnait avant et qu'il régresse aujourd'hui. Comme toute grande réforme de société, les 35 heures ont touché à des aspects multiples et complexes: du fonctionnement interne des entreprises aux problèmes financiers, de la vie familiale à la solidarité entre chômeurs et salariés. Cet enjeu de société ne pouvait être réalisé dans une perfection immédiate. L'important est d'analyser les difficultés et de trouver les bonnes adaptations, dans la plupart des cas sans doute par la négociation.

En savoir plus
Ce texte reprend de larges extraits de l'intervention de Martine Aubry lors de son audition par la mission parlementaire d'évaluation des conséquences économiques et sociales de la législation sur le temps de travail, le 4 février dernier. Voir www.assemblee-nationale.fr/12/dossiers/temps_travail_mission.asp

Martine Aubry, maire de Lille et ancienne ministre de l'Emploi
AlternativesEconomiques n° 225 - mai 2004



NOTES



(1)
Les retours financiers sont évalués à 15 245 euros (100 000 F) par chômeur évité (estimation prudente). Il y a environ un chômeur évité pour 20 salariés passant à 35 heures (6 à 7 emplois créés + 20% de flexion de la population active). Donc l'aide forfaitaire moyenne équilibrant les retours financiers était de 762 euros (5 000 F = 100 000 F/20). Par prudence, le montant de 610 euros (4 000 F) a été retenu. Ce montant visait les entreprises passant à 35 heures après la baisse de la durée légale. Celles qui ont anticipé ont bénéficié d'un montant supérieur pendant cinq ans. Exemple: pour les pionnières, 1 372 euros (9 000 F), puis 1 220 euros (8 000 F), 1 067 euros (7 000 F), 914 euros (6 000 F) et enfin 762 euros (5 000 F) la cinquième année.
(2)
Dernière année où le calcul est possible puisqu'à partir de juillet 2003, les aides sont accordées sans contrepartie de 35 heures.
(3)
Le flux d'investissements étrangers est passé de 20 milliards d'euros en 1997 à 55 milliards d'euros en moyenne entre 1997 et 2002, avec un pic à 60 milliards en 2001, soit trois fois plus qu'en 1997.












Lire aussi : 
>>> DEC2016. Zone euro : Le taux de chômage sous la barre des 10 %, pour la première fois depuis avril 2011 Le Monde
>>> Aux Pays-Bas, on travaille en moyenne 30 heures par semaine (LeMonde, février 2016)
>>> 35h, le coup de bambou de la gauche Libération
>>> Les syndicats montent au créneau contre le projet de loi El Khomri  Libération
>>> Dominique Méda et Pierre Larrouturou: «Une véritable machinerie idéologique a été mise en place autour des 35 heures»
>>> Le revenu salarial des Français, en baisse depuis 2009
>>> Selon un rapport censuré de l'Igas, les 35 heures ont bien créé 350 000 emplois

Sur la question du travail et du social :
>>> En Bretagne, élus et patrons lancent un plan zéro chômeur (LeMonde , février 2016)
>>> Dans le Haut-Rhin, le versement du RSA conditionné à du bénévolat, pourquoi pas...    Certains sont contre : Yves Faucoup, Marisol Touraine , ...
>>> Les Français ne veulent pas de la loi El Khomri Challenges
>>> Projet de loi El Khomri: la guerre des économistes est déclarée  Challenges 
>>> RSA et Travail d'intérêt général : la communauté fait quelque-chose pour ses pauvres, c'est une bonne chose ; mais est-il choquant qu'en contrepartie de cette solidarité de la communauté, les bénéficiaires du RSA fassent aussi quelque chose pour la communauté ? Une forme de travail d'intérêt général par exemple (aide au nettoyage des rues, aide à dépolluer la nature polluée, etc...) . C'est aussi une façon de créer du lien social, de briser l'isolement des plus démuni, d'éviter qu'ils ne s'engagent, par ennui ou désoeuvrement, dans une spirale de dépression-délinquance-mendicité ... Bref, faire quelque chose pour la communauté participe au sentiment d'appartenance à cette communauté et à la dignité humaine.  

>>> Travailleurs détachés : Bruxelles persiste et signe. La commissaire Marianne Thyssen défend sa ligne malgré les réticences de onze Etats membres.
>>> Les ateliers do-it-yourself d’HelloMaker débarquent à Lyon



Sur la question sociale et fiscale : 
>>> Evasion fiscale. Les sorties de capitaux affaiblissent l'euro (Les Echos)

Sur la question du mode de vie :
>>> Moins loin, moins vite, comment veut-on vivre dans le futur ? Malgré ce que sous-entendent médias et politiciens (pas tous, certes...), le « travailler plus pour gagner moins » n'est pas la formule rêvée par les populations européennes.
>>> Le dimanche, jour du seigneur, jour de repos pour la planète, jour pour passer du temps avec sa famille, ses amis, jour pour souffler ( ville sans voiture...), jour pour la spiritualité,  

>>> Entreprendre, le choix d’une autre cadence
« Je me suis rendu compte que nous étions devenus des machines à tableaux et à chiffres. À 15 heures, j’étais épuisé et cela me posait un problème de sens. J’ai dit à l’équipe : soit on change tout, soit j’arrête. »
>>> oct2016 Vague de suicides alarmante à La Poste









Santé, retraite

14 avril 2019 (âge de la retraite)
>>> « Le report de l’âge de la retraite ne pourrait qu’approfondir la défiance des Français à l’égard du système »
TRIBUNE. Dans une tribune au « Monde », la sociologue Anne-Marie Guillemard plaide pour un « new deal » équilibrant contributions et rétributions entre les générations.
 (...) Le principe d’un report de l’âge de la retraite est un totem de longue date de la droite et de tous ceux qui ne voient dans le système de retraite qu’un coût financier qu’il est urgent de contenir en raison du vieillissement de la population. Cette vision strictement comptable occulte les vrais enjeux d’une réforme, qui sont d’abord sociaux et humains. Les Français n’ont plus confiance dans leur système de retraite.
Anne-Marie Guillemard (Lemonde)

Janvier 2018 (santé et travail)
>>> Anxiété, burn-out… plus de 10.000 affections psychiques reconnues comme accidents du travail en 2016 L'Obs

Novembre 2016 (Accès à l'eau)
>>>  L'eau slovène ne sera jamais à vendre. La Slovénie a en effet inscrit dans la Constitution du pays le droit à l'eau potable, une ressource qui ne peut être privatisée. Une première
dans l'Union européenne.

(Accès aux soins et aux besoins de première nécessité)
>>> Des druides pour les déserts médicaux ?
Confrontée au problème des déserts médicaux, la commune bretonne de La Roche-Derrien a annoncé avoir recruté... un druide. Avant, finalement, d'avouer qu'il s'agissait d'un canular. 

Comment lutter contre la désertification médiale en France ? On peut militer auprès du ministère de la santé ou des députés ou faire du lobbying pour son territoire dans les couloirs de l'Assemblée. On peut aussi, comme le maire de La Roche-Derrien, petite commune de 1 000 habitants dans les Côtes-d'Armor, alerter sur le manque de médecins en clamant haut et fort dans la presse qu'on en a été réduit à recruter un druide.

Constatant que les trois médecins de la commune étaient "au bout du rouleau" depuis que le quatrième praticien était parti, et qu'un autre devait bientôt prendre sa retraite, le maire, Jean-Louis Even, a voulu signaler la situation de sa commune et de l'ensemble du Pays rochois (5 000 habitants), avec une campagne de communication qui n'hésite pas à tomber dans les clichés ("La Bretagne ! Les druides ! Hahaha !"). Mais elle a bien fonctionné. D'abord relayé par la presse locale (ici ou ici), la démarche a attiré l'attention d'autres médias, qui n'étaient d'ailleurs pas très certains que ce druide soit... sérieux.
"C'est aussi de la provocation", reconnaît facilement Jean-Louis Even lorsqu'on lui demande des nouvelles du "druide".
"On voulait choquer, et tirer la sonnette d'alarme au nom de toutes les autres communes qui galèrent. Les autres communes sont saturées elles aussi."

Un "shaman" en période d'essai

Depuis six mois, La Roche Derrien cherche son nouveau médecin en diffusant des annonces en ligne, sur des sites professionnels, sur les réseaux sociaux ou sur des panneaux de la route départementale. Elles vantaient "le cabinet médical tout neuf" de La Roche-Derrien, avec "un secrétariat, des laboratoires, des pharmacies et des hôpitaux à proximité". Il n'y eut aucune réponse.
Jean-Louis Even a donc changé d'approche. Il assure que c'est une annonce sur LeBonCoin qui lui a permis d'entrer en contact, la semaine dernière, avec le fameux Gwenn-Maël, 47 ans, qui se présente, sur un Tumblr et une page Facebook créés cette année, comme "druide guérisseur" et "shaman breton (sic)". Un recrutement express assez étonnant, car l'annonce sur LeBonCoin a seulement été mise en ligne le 16 mars. Après un conseil municipal extraordinaire, le "druide" est officiellement embauché en période d'essai, et s'occupera de "questions de stress ou de fatigue" dans un local mis à disposition par la mairie. Le Grand Druide de Bretagne, Pierre Kerlo'ch, nous confie qu'il ne connaît pas le druide Gwenn-Maël, et qu'il n'y a pas vraiment moyen de vérifier s'il l'est ou pas.
Peu importe, au final, qu'il s'agisse d'une opération de com' ( Mise à jour le 18/03 : et c'était bien une opération de com', avec une société bretonne derrière) Faire venir un homme qui se présente comme druide en grande pompe dans son village est une démarche facile et pas chère pour alerter médiatiquement sur les 192 déserts médicaux français en général, et du problème de manque de médecins à La Roche-Derrien en particulier.
Selon les Atlas régionaux de la démographie médicale publiés en novembre par le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM), pour près de 2,5 millions de Français, l'accès au soin pose problème. En novembre, la ministre de la santé, Marisol Touraine, a annoncé la deuxième phase du plan de lutte contre les déserts médicaux, qui prévoit l'augmentation du numerus clausus, le nombre d’étudiants de médecine de première année admis à l’issue du concours, avec 136 places supplémentaires au concours 2016. Le plan n'inclut, a priori, pas encore les druides.




>>> L’inquiétante dévitalisation des bourgs.
Trois phénomènes mortifères se combinent. La fermeture d’industries et de services publics entiers, amplifiée par la révision générale des politiques publiques

>>> Quand des villages se meurent
Pour décrire l'agonie de certains villages français (mais pas que français), l'abandon dont ils sont victimes (à cause, par exemple, de la réduction des services publics), quelques phrase de Eric Vuillard, prix Gongourt 2017 :
(...) Mais à Teruel, il ne se passe rien. Seulement la vie stagnante, le croupissement paisible des anciens. Ici, il n’y a personne. Les rues sont vides, les routes sont vides, le ciel est vide. Tout le monde est parti. Peu d’enfants viennent au monde, les jeunes se tirent et les vieux meurent doucement, les uns après les autres, ce qui est leur façon de quitter le pays. Ici, pas de métropole, pas de ville, juste quelques maisons de pierres et de tuiles, on appelle ça des villages. Tout a fermé, les écoles d’abord, puis les commerces, les supérettes et les stations-services.
Bibliobs








Mots clés : maillage territorial, ruralité, urbanisation, problèmes locaux, transports, solidarité, inégalités entre régions, déclassements, perte de métiers traditionnels en milieu rural et désertification rurale, agriculture paysanne

















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