La guerre est loin d'être finie. En Ukraine, la Russie (appuyée par la Corée du nord, et l'Iran) continue, quotidiennement, ses crimes et son grignotage. Aux Etats-Unis, on ne sait pas ce que fera Trump. En Europe, on ne sait pas où finira la montée des lèche-bottes poutiniens : un poutinien vient de faire un bon score en Roumanie, le poutinien Orban contunue ses provocations, (mais reste isolé), un poutinien vient de remporter une mairie en PACA. Certes. N'empêche que pour le criminel de guerre du Kremlin, les nuages s'assombrissent.
Exemples :- L’envoi de militaires européens en discussion. Dans la perspective d’un désengagement américain vis-à-vis de Kiev
en raison du retour de Donald Trump à la Maison Blanche, Paris et
Londres n’excluent pas de prendre la tête d’une coalition en Ukraine,
selon des modalités qui restent à préciser. Lemonde
- Les sanctions américaines contre Gazprombank devraient accélérer le découplage entre l’UE et la Russie Euractiv
- Malgré les rodomontades de Vladimir Poutine et de ses sbires, la Russie est pourtant loin, très loin, de l’emporter. En bientôt trois ans de conflit, le maître du Kremlin n’a obtenu aucun des objectifs qu’il s’était fixés. Et le temps ne joue pas en sa faveur.
« L’opération spéciale » contre l’Ukraine aurait dû être pliée en trois ou quatre jours et les tankistes russes partis de Biélorussie avaient pris dans leurs chars leurs uniformes de parade pour le défilé de la victoire dans les rues de Kiev. Le conflit dure depuis maintenant plus de 1 000 jours et s’est transformé en une guerre d’attrition avec un coût humain exorbitant pour l’Ukraine – où 12 000 civils au moins ont été tués – mais aussi pour l’agresseur russe qui a déjà perdu près de 200 000 hommes, soit dix fois plus que pendant la guerre d’Afghanistan.
Malgré les rodomontades de l’homme fort du Kremlin et de ses sbires, la Russie est pourtant loin, très loin, de l’emporter. Après les premiers jours d’offensive suivie d’une débâcle opérationnelle face à la résistance ukrainienne, la Russie a perdu à l’automne 2022 une bonne part des zones conquises six mois plus tôt, notamment dans les régions de Kherson et Kharkiv. Elle a depuis réorganisé et modernisé son armée et s’est installée dans une efficace économie de guerre. Mais malgré les moyens mis en œuvres et des pertes immenses sur les fronts du Donbass, évaluées par les services de renseignement occidentaux à quelque 1 700 hommes par jour, tués ou gravement blessés, ses forces n’avancent que très peu, une moyenne de 15 km² par jour.
Qui aurait imaginé à l’aube du 24 février 2022 que l’armée russe serait ainsi mise en échec ? Seuls probablement y croyaient les Ukrainiens et leur président Volodymyr Zelensky devenu l’homme symbole de la résistance rétorquant à la proposition de Joe Biden de l’évacuer vers la Pologne : « j’ai besoin de munitions et pas d’un taxi ».
C’est déjà une guerre mondialisée
Cette première grande guerre du XXIe siècle menée avec des méthodes du XXe au nom de visions impériales datant du XIXe est venue rappeler aux Européens la fragilité de ce qu’ils considéraient jusqu’ici être le plus notable succès du projet communautaire, celui d’avoir pour toujours chassé le conflit armé entre Etats du Vieux continent. Le choc fut immense et trois ans plus tard, alors que le conflit s’enlise, ses répliques continuent à se faire sentir, y compris bien loin des steppes du Donbass.
C’est déjà une guerre mondialisée dont les métastases s’étendent au Moyen-Orient, avec un Iran toujours plus lié à la Russie qui lui livre des drones et surtout à l’Extrême-Orient avec l’implication directe de la Corée du Nord qui a envoyé au moins 10 000 hommes pour aider sur le terrain une armée russe à court de chair à canon au nom d’une « amitié vigoureuse » scellée en juin 2024 par un accord mutuel de défense entre Vladimir Poutine et Kim Jong Un.
Cette internationalisation du conflit a incité finalement Joe Biden à donner son feu vert pour l’utilisation par Kiev des missiles ATACMS pour des frappes plus en profondeur sur le territoire russe, sur une distance de quelque 300 kilomètres, afin de détruire des dépôts de munitions, des centres de commandement, des regroupements de troupes, mais après validation des cibles par les Etats-Unis.
Une nouvelle donne avec l’élection de Donald Trump
L’autre grand tournant est l’élection de Donald Trump qui a promis de résoudre « le conflit en vingt-quatre heures », par une négociation directe avec Vladimir Poutine qui risque de se faire aux dépens de Kiev. Le nouveau président républicain a plusieurs fois menacé pendant sa campagne de couper le soutien à l’Ukraine et les livraisons d’armes. Il ne faut pas oublier néanmoins que durant son premier mandat, Donald Trump, à la différence de son prédécesseur Barack Obama, avait accepté d’armer l’Ukraine, notamment en lui fournissant des redoutables missiles antichars Javeline et renforcé de plus de 30 000 hommes les effectifs militaires américains en Europe orientale.
En outre, dans la très hétérogène équipe qui va s’installer au pouvoir, les deux postes les plus directement liés à la politique étrangères et à la sécurité, sont respectivement occupés par Marco Rubio et Mike Waltz, républicains à l’ancienne certes convaincus que la priorité est de faire face à la menace chinoise mais bien conscients qu’une défaite de l’Ukraine ne pourrait qu’encourager les ambitions de Xi Jin Ping comme de la mollarchie iranienne.
Cette nouvelle donne, avec la perspective de négociations de paix l’hiver prochain, alimente un certain défaitisme au sein des Vingt-Sept, même si des dirigeants européens, à commencer par la présidente de la commission Ursula von der Leyen ou le président français rappellent haut et fort que le soutien à l’Ukraine continuera aussi longtemps que nécessaire.
L’Ukraine n’a pas perdu la guerre, et c’est déjà une grande victoire
Ce conflit est certes existentiel pour l’Ukraine, mais la fatigue de la guerre est bien réelle. On ne connaît pas le bilan des pertes militaires mais elles se comptent par dizaines de milliers dans un pays trois fois moins peuplé que la Russie. Le pourcentage d’Ukrainiens opposés à toute concession territoriale en échange de la paix baisse régulièrement même s’il tourne encore autour de 60 %.
Et l’amertume est palpable vis-à-vis des Occidentaux, et en premier lieu des Américains qui ont toujours livré les armes trop tard et en nombre insuffisant. « L’administration Biden a été trop timorée, paralysée par la peur d’une défaite de la Russie. En particulier à l’automne 2022, lorsque nous avons été capables de repousser les Russes. Nous aurions eu alors besoin d’une assistance extrêmement rapide pour terminer le travail », souligne Daria Kaleniuk du centre anti-corruption et figure de poids de la société civile.
Reste que si l’Ukraine n’a pas gagné la guerre, elle ne l’a pas perdue et c’est déjà en soi une grande victoire. L’échec russe est évident même si la propagande du Kremlin continue de plastronner, trop souvent relayée aussi bien au Sud qu’en Occident par des intellectuels complaisants ou aveugles, ces « idiots utiles » comme les avait surnommés jadis Lénine. C'est aussi à cette aune qu'il faut lire les gesticulations sur le nucléaire et le tir encore à confirmer d'un missile intercontinental, de ceux qui peuvent porter des têtes nucléaire même s'il n'en avait pas.
Vladimir Poutine n’a obtenu aucun des objectifs qu’il s’était fixés
En bientôt trois ans de conflit, Vladimir Poutine n’a obtenu aucun des objectifs qu’il s’était fixés. Ses buts de guerre ont été variables et confus. En juillet 2021, il clamait que « Russes et Ukrainiens forment en fait un seul peuple occupant le même espace spirituel et historique ». Cette négation de la nation ukrainienne était un avertissement. Depuis, ses revendications territoriales se sont faites plus limitées. Outre la Crimée annexée dès le printemps 2014, il a proclamé en 2022 l’intégration à la Russie de quatre « oblast » (départements) de l’est de l’Ukraine : Donetsk, Louhansk, Zaporijia et Kherson. Les deux premiers étaient déjà en bonne part aux mains des rebelles pro-russes depuis 2014 ; les deux autres sont encore pour l’essentiel sous le contrôle de Kiev et ils le resteraient s’il devait y avoir un cessez-le-feu gelant les actuelles lignes de front.
Le maître du Kremlin clamait vouloir « dénazifier » l’Ukraine, alors même que son président est d’origine juive, mais il a suscité avec son « opération spéciale » un sursaut national pour faire face à l’invasion qui a balayé et rendu inaudibles les quelques forces politiques favorables à des compromis avec la Russie.
Avec l’UE et l’Otan, le processus est amorcé
Le bilan géopolitique de la guerre de Poutine est encore plus affligeant par rapport à ses intentions premières. Il voulait bloquer la route de l’Ukraine vers l’Otan et l’Union européenne. Les Vingt-Sept, même les plus réticents en général aux élargissements vers l’est comme la France, ont accepté la candidature de l’Ukraine ainsi que celle de la petite Moldavie et ont ouvert en juin 2023 les négociations d’adhésion. Elles seront longues mais désormais, il est évident pour tous les Etats membres que le tracé de la frontière orientale de l’Union est dans l’est ukrainien.
Certes l’intégration de l’Ukraine à l’Otan n’est pas à l’ordre du jour, au moins dans l’immédiat en raison notamment de l’opposition des Etats-Unis comme de l’Allemagne, mais le processus est amorcé avec les signatures d’accords bilatéraux. D’une manière ou d’une autre l’Ukraine sera associée aux structures de l’Otan et aux garanties de sécurité qu’elle incarne même si Poutine espère encore le lui interdire.
Il voulait arrêter l’expansion vers l’est de l’Alliance Atlantique, l’attaque contre l’Ukraine a incité la Suède et la Finlande à abandonner leur traditionnelle neutralité pour intégrer cette organisation. Désormais la Baltique est un lac otanien à l’exception de la petite fraction de littoral russe à l’extrême est. Il en est de même pour la mer Noire où la flotte russe a subi revers sur revers à cause des drones navals ukrainiens, perdant plus du tiers de ses unités sans pouvoir les remplacer en raison du blocage des détroits à tout passage de navires des pays belligérants par la Turquie. Le pays, depuis le début du conflit, applique à la lettre les accords de Montreux de 1936. Si Poutine peut se targuer d’un soutien de nombre des pays du sud qu’il a reçus en grande pompe pour un sommet des Brics à Kazan, il ne peut guère sortir de Russie car il est visé par un mandat d’arrêt pour crime de guerre de la Cour Pénale Internationale pour des déportations illégales d’enfants ukrainiens.
La Russie, un pays passé dans une « économie de la mort »
Malgré les apparences, le temps ne joue pas en faveur du maître du Kremlin. Certes les sanctions économiques imposées par les Occidentaux n’ont pas eu l’effet escompté et nombre des pays du sud, y compris ceux qui avaient voté à l’ONU la condamnation de l’agression russe ne les appliquent pas. La Russie vend son pétrole à l’Inde et à la Chine mais le dynamisme de l’économie russe n’est qu’apparent, gonflé par les commandes massives à l’appareil militaro-industriel dans un pays passé en économie de guerre.
Et tout autant dans ce que l’économiste Vladislav Inozemtsev, depuis réfugié en Occident, appelle une « économie de la mort ». La famille d’un homme de 35 ans qui se bat en Ukraine pendant un an avant d’être tué sur le champ de bataille reçoit, entre sa solde et les primes liées à son décès, environ 14,5 millions de roubles, soit l’équivalent de 150 000 dollars. Plus qu’il n’aurait pu en gagner dans toute sa vie. C’est un transfert massif d’argent vers les zones les plus pauvres du pays qui fournissent les volontaires pour combler les pertes. Il faut en moyenne 20 000 nouveaux volontaires par mois. Cette augmentation constante des primes à l’engagement témoigne aussi en creux des difficultés croissantes du recrutement. Vladimir Poutine n’a pas encore gagné la guerre, bien au contraire. Une raison de plus de tout faire pour aider les Ukrainiens ces prochaines semaines pour qu’il n’emporte pas indûment la mise à la table des négociations.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire