Economix, la première histoire de l'économie en BD
>>> L'économie en BD, c'est plutôt une bonne idée ! Et les deux premiers chapitres arrivent à un bel exploit : nous expliquer dans le même moment la dynamique du capitalisme et la pensée économique qui l'a accompagnée. Des mercantilistes aux néoclassiques en passant par Adam Smith, Thomas Malthus, David Ricardo et Karl Marx, le propos est très pédagogique et passionnant. Ensuite, le livre, traduit de l'américain, nous raconte surtout l'histoire de l'économie des Etats-Unis, du pouvoir des trusts au début du XXe siècle à la crise des subprime. On se dit que l'exercice mériterait d'être fait pour l'économie française.
Le ton du livre est résolument progressiste sur le plan politique et hétérodoxe sur le plan économique. Le propos reste clair tout du long, mais, BD ou pas, l'ouvrage est épais, et si la pensée économique fait quelques incursions régulières, elle est bien moins présente qu'au début. A lire doucement, en ayant beaucoup de temps.
>>> L'Economie pour tous en version BD
La mise en bouche des premières planches,
en forme de cours de rattrapage pour ceux qui n'aurait pas - et encore -
dépassé le Bac ES, reste facilement accessible. On comprend tout sans
forcer. C'est la « Main invisible ", de l'origine à 1820, les prémices
du capitalisme, du marché, de l'entreprise : le modèle hollandais, le
mercantilisme à la Colbert (seule référence à la France avec la
révolution et Napoléon !), les physiocrates et Adam Smith, l'apparition
des corporations, les scientistes (Malthus et Ricardo)... De quoi
s'échauffer un peu avant les plats de résistance. Car il faut vite
s'accrocher. Normal. L'économie et le monde se sont bougrement densifiés
et complexifiés au fil des siècles. Et comme l'ouvrage en déroule
linéairement l'histoire... Suivent donc, la révolution industrielle et
ses bouleversements, le pouvoir du capital et la constitution des grands
trusts (transports, énergie, banques...), la guerre mondiale et la
révolution russe, l'hyperinflation allemande et la crise de 1929, etc...
On enchaîne ensuite sur la période « moderne », depuis les années 80 :
la mondialisation ; Internet, la « nouvelle économie " et son krach; la
bulle immobilière et la crise des subprimes, la montée en puissance des
BRICS et en particulier celle de la désormais omnipotente Chine, le
mouvement Occupy Wall Street...
Extraits
p154
Mettre les annonceurs en rogne serait une stratégie d'entreprise stupide, alors a télé (et les radios, revues, journaux) s'autocensure souvent.
[William Shirer, journaliste légendaire viré en 1947 parce que CBS s'inquiétait qu'un annonceur puisse trouver à redire à ses reportages]
Ainsi, les nouvelles, l'information et l'opinion -la culture, même, à un certain degré- convergèrent en un courant unique.
Les gens pouvaient être en désaccord, mais cela n'avait plus la même importance qu'autrefois. Réfléchissons : si vous étiez assez en colère pour hurler contre la télé ...
... peut-être que d'autres hurlaient aussi. Peut-être que tout le monde hurlait. Et alors? Personne ne pouvait entendre les autres.
Cette non-expression peut contribuer à expliquer le développement après-guerre de l'apathie politique. Même les débats politiques sérieux commençaient à se réduire à qui passait bien à la télé.
p155
Eisenhower donna un nom à l'accumulation de pouvoirs que nouq avons décrite p 150-151.
"C'est le complexe militaro-industriel"
p162 (chap 6, l'ère des limites. 1966-1980)
"Un système industriel qui utilise quarante pour cent des ressources du monde pour approvisionner moins de six pour cent de la population mondiale ne pourrait être qualifié d'efficace qui s'il obtenait des résultats remarquablement positifs en terme de bonheur, de bien-être, de culture, de paix et d'harmonie humains. Je n'ai pas besoin de m'attarder sur le fait que le système américain est un échec sur ce plan, ni qu'il n'y a les moindres perspectives qu'il puisse y arriver si seulement il parvenait à un taux supérieur de croissance de la production." E.F. Schumacher, Small Is Beautiful (1973)
p171
p244
Corporations puissantes ... sans les organismes et institutions qui avaient été conçus pour les contrôler tels que les syndicats, les protections environnementales, les lois sur la sécurité du travail ou les protectios des salaires et des horaires...
"L'usine type (...) est entourée de fil barbelé. Derrière les portes verrouillées, les travailleurs, pour la plupart des jeunes femmes, sont surveillées par les gardes qui les frappent et les humilient au moindre prétexte et qui les renvoient si un test de grossesse imposé s'avère positif.
Chaque travailleur répète le même - coudre une boucle de ceinture, une manche - peut-être 2000 fois par jour. Ils travaillent sous des lumières cruellement vives, sur des périodes allant de 12 à 14 heures, dans des usines surchauffées, avec trop peu de pauses toilettes et un accès restreint aux salles d'eau (pour réduire la nécessité des pauses toilettes), lesquelles, souvent, sont pleines et ne conviennent de toute façon pas à une civilisation humaine" (Joe Bakan, The corporation, 2004. Film documentaire)
p252
Malgré les années de scandales et de corruption politique, malgré (...) la grande masse des américains n'a pas encore abandonné l'idée qu'ils formaient un peuple uni (Bill Meuers, journaliste, oct2011, suite aux attentats du 11-09-2001)
p258 sur la faillite des classes moyennes
Combien se passèrent de manger, combien ne prirent plus leurs médicaments, n'allèrent plus chez le médecin ; combien ne payèrent plus leurs factures. C'était des gens de la classe moyenne. Des gens qui...
(Elizabeth Warren)
p234
La prospérité n'avait plus la même signification qu'autrefois. Dans beaucoup de famille de classe moyenne, les deux partenaires travaillaient non pas par choix mais par nécessité. (...) Un autre moyen de s'en sortir : travailler plus longtemps avant de prendre un appartement, avant de se marier, avant d'acheter une maison... Lorsque les gens avaient enfin les moyens et pouvaient fonder une famille, il pouvait être trop tard.
Quant aux pauvres, impossible de mettre de l'argent de l'argent de côté, même avec deux emplois.
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